Cette semaine, nous partageons une interview d'une famille passionnée par le voyage et qui a décidé d'en faire son monde de vie! Avec trois enfants, ils parcourent les routes d'Europe tout en travaillant grâce à internet: c'est ce qu'on appelle une famille nomade digitale!
Pouvez-vous vous présenter et nous donner la composition de la famille?
Il y a d’abord le papa, Christophe, bientôt la quarantaine. Moi, Muriel, 37 ans. Notre fille, Léna, a 6 ans, et Lissandre, lui, qui vient d’avoir 5 ans.
Nous avons eu l’agréable surprise d’une troisième grossesse pendant notre voyage en Italie. J’ai accouché d’un petit Jona, qui a bientôt 3 mois.
Expliquez-nous ce qui vous a décidé à changer de mode de vie et à devenir nomade...
Muriel : en ce qui me concerne, j’avais envie d’explorer le monde. J’ai été longtemps prisonnière de mon agoraphobie, et ai beaucoup souffert de cette maladie, limitée à un périmètre sécurisant. Voyager, c’était d’abord me défier, savoir ce que j’avais dans les tripes, affronter mes peurs et dépasser mes limites.
C’était aussi un mode de vie qui me permettrait d’être à 200% avec mes enfants. Plus de routine, mais une expérience de chaque jour!
Christophe : chez moi, c’est quelque chose de très profond. À 20 ans j’écrivais déjà ce nécessaire besoin de sortir d’une vie mécanique et prévisible. J’avais compris que notre inaction nous menait sur des chemins que d’autres avaient choisis pour nous. Je me sentais enfermé physiquement et psychologiquement, et c’était en partie de ma faute. Le quotidien a vite fait d’endormir nos rêves pour protéger nos acquis, d’aplanir notre personnalité par souci d’intégration sociale. Depuis je me cultive, j’entreprends, et je prends des risques pour créer les conditions d’un épanouissement pérenne pour moi et ma famille. Le nomadisme est, je pense, une brique de plus à cette construction et l’expérience nous dira si cette décision était pertinente.
Je n’ai pas l’impression de fuir, mais d’aller vers quelque chose. À titre personnel, cette expérience me ressemble. J’aime cette instabilité qui me demande de toujours rester attentif aux choses et aux personnes. C’est stimulant et cela me permet d’exploiter pleinement ma créativité.
Comment arrivez-vous à concilier travail et mode de vie nomade ?
Muriel : concilier notre travail et le nomadisme n’est pas bien compliqué car mis à part les jours où nous sommes sur la route pour aller d’un point A à un point B,
le reste c’est comme avant : du travail à domicile.Ce qui est un réel défi, c’est de concilier le travail avec une vie de famille où les 3 enfants sont (naturellement) une
distraction de chaque instant. Pour la concentration, y a mieux :)
Christophe : C’est là tout l’enjeu que de trouver un équilibre entre le temps passé à gagner de l’argent pour permettre de financer notre liberté et celui passé
à vivre notre liberté avec nos enfants. De manière générale, je travaille un petit peu dans la journée et un peu plus dans la soirée dès que les enfants sont couchés.
Et du côté des enfants, comment gérez-vous la scolarité, les loisirs, les copains…?
Muriel : j’avais commencé au début du voyage à faire l’instruction en famille de manière très formelle, avec des cahiers, des apprentissages concrets. Puis, au
vu du caractère bien trempé de Léna, je me suis tournée davantage vers le unschooling: les enfants apprennent en fonction de leurs envies, de ce qui les anime, les motive. Et le
voyage leur permet de découvrir beaucoup à chaque endroit différent. Nous pouvons arpenter un site de temples grecs et apprendre un peu d’histoire au passage, comme on peut faire de la lecture en
explorant un menu de restaurant :) Tous les moyens sont bons pour apprendre, tant que les enfants sont acteurs.
Les loisirs, c’est en famille la plupart du temps: nous tâchons de faire des sorties plaisir pour Christophe et moi, plutôt culturelles (château, cathédrales, sites
archéologiques…) mais aussi pour les enfants (parc, plage…). Nous devons penser à l’équilibre de chacun et construire le voyage qui nous ressemble.
Les copains, c’est, depuis que nous sommes partis, le gros point noir que nous ne parvenons pas à résoudre totalement. Bien sûr, il y a des enfants partout, mais
Léna et Lissandre, assez fusionnels, ont du mal à aller vers eux, la barrière de la langue ne leur facilitant pas la tâche. Ils réclament beaucoup à avoir des copains sur du long
terme, pas seulement des copains d’une heure rencontrés sur un lieu, mais avec qui ils peuvent créer des souvenirs. On en crée peu en une journée. Les scolariser est une option mais le problème
se répètera puisque nous changeons d’endroit chaque mois. Nous essayons de maintenir les liens créés avec leurs anciens copains et cousins/cousines, par le biais des cartes postales, de Skype.
Mais il est vrai que c’est un vrai challenge que de combler ce manque. Peut-être envisagerons-nous un voyage sur mesure: 9 mois en vadrouille, 3 mois en France, et ce chaque
année, afin de permettre la continuité des liens amicaux sur du plus long terme...
Avez-vous une logistique particulière (logement, transport, santé…)?
Tout est assez simple pour nous : nous voyageons avec notre voiture. Toutes nos affaires tiennent dans le coffre et quelques sacs de jouets/livres sont stockés aux pieds des enfants. Nous louons des AirBnb chaque mois que nous négocions souvent 1 semaine avant de partir. Une fois installés, nous explorons les environs dans un rayon de 100 à 150 kms à la ronde. Un mois dans chaque maison nous semble juste le minimum pour prendre le temps de découvrir tranquillement. Nous restons environ 3 à 5 mois dans chaque pays, mais rien n’est figé dans le marbre. C’est juste assez pour se faire une petite idée et s’imprégner de l’ambiance, des gens, de la culture.
En ce qui concerne la santé, nous sommes rattachés au système de santé français, tant que nous sommes en Europe. Ce ne sera pas le cas une fois sortis de l’UE. Mais nous avons
encore le temps, vu le rythme auquel nous allons...
Quels voyages avez-vous pu réaliser, grâce à ce mode de vie ?
Nous sommes des escargots du voyage, nous avons commencé par le Portugal et y sommes restés 4 mois, puis 3 mois en Espagne que nous avons
traversé du sud-Ouest jusque vers la côte est. Enfin, nous sommes partis en Italie pendant 4 mois, du Nord jusqu’à Pise, puis nous nous sommes ensuite envolés en
Sicile (première fois sans notre voiture, 2 mois avec une seule grosse valise en soute pour 4).
Pouvez-vous nous détailler un peu plus celui que vous avez le plus apprécié ?
Muriel: moi, j’ai adoré le Portugal, car c’est un pays simple, avec des gens chaleureux. Les paysages du Nord au Sud sont totalement différents et époustouflants
par endroit. Culturellement, architecturalement, il y a tant à découvrir! Nous avons aussi eu la chance de faire de très jolies rencontres, peut-être cela a-t-il joué sur mon coup de coeur du
Portugal. Mon autre coup de coeur va pour la Sicile: nous avons vécu des moments extraordinaires, avec des hôtes tout aussi attachants.
Quel est pour vous le plus grand avantage de ce mode de vie (du point de vue des parents et des enfants) ?
Muriel : pour moi, incontestablement, le plus gros avantage de ce mode de vie est de voir grandir mes enfants. Non seulement je les regarde chaque jour découvrir le monde, mais nous partageons cette expérience unique, en famille. Nous prenons le temps d’être ensemble, sans horaire, sans regarder les heures défiler. C’est un luxe quand on a connu les cadences d’un travail de salarié, où il faut pointer chaque matin et laisser son enfant à une autre.
Pour les enfants: pas besoin de les réveiller le matin, ni de les forcer à se coucher tôt le soir, ils vivent à leur rythme, en faisant une sieste s’ils le
veulent, en se responsabilisant. Difficile de rendre autonome un enfant quand nous sommes nous-même parés de contraintes (horaires, lieux)... Lorsque nous sommes pressés par le temps, nous avons
tendance à faire les choses à la place de l’enfant. Nous, nous souhaitons leur rendre leur autonomie: ils se lavent seuls, s’habillent seuls, choisissent seuls leurs vêtements (tant pis parfois
pour le doux mélange de couleurs^^), choisissent avec nous ce que nous allons manger et préparent avec nous le repas...Bref, ils prennent le temps de devenir grand et autonome. En voyage, il y a
quand même bien moins de contraintes.
Et les inconvénients ?
Muriel : le principal inconvénient reste la difficulté à nouer des relations amicales en un mois. C’est un laps de temps assez court, finalement, pour réellement
créer une relation sincère et durable, et frustrant lorsque nous parvenons à nouer une relation amicale. Mais nous continuons notre route, car, on le sait, il y a des gens et des lieux
magnifiques plus loin!
Le deuxième inconvénient, c’est un détail pratique: le manque d’appareil ménager pour cuisiner. C’est assez rare d’avoir un mixeur, un cuit-vapeur ou un fouet. Je ne peux donc pas cuisiner comme je le souhaiterai. Pouvoir réaliser des soupes, ou un gâteau est donc fonction du lieu dans lequel nous sommes! Bien évidemment, on ne choisit pas nos AirBnb en fonction de ces détails mais ce sont des petits rien qui parfois, peuvent gâcher nos envies de mousse au chocolat ou de gâteau...Les p’tits plaisirs simples de la vie...
Auriez-vous des conseils particuliers à ceux qui hésitent à sauter le pas ?
Muriel : le premier conseil est de penser à la sécurité financière sur du long terme. Il faut calculer les entrées et estimer les sorties. Un an de voyage donne
un bon aperçu de nos besoins mensuels. Nous, nous vivons avec moins d’argent à l’étranger, les loyers étant négociés et bien inférieurs à ceux que nous avions en France. La différence, nous
pouvons donc l’utiliser pour les sorties et petits plaisirs (restaus, sortie culturelle
payante…)
Le deuxième conseil est de partir si et seulement si chaque membre de la famille aborde le projet positivement, et non en le subissant. Si l’un des membres de la famille ne souhaite pas partir, je crains que sur du moyen/long terme, cela soit voué à l’échec.
Dernier conseil: si les deux premiers ont déjà été abordés et réfléchis, alors ne pas trop cogiter, sinon, on ne part jamais ;)
Enfin, quels sont vos prochains projets voyages?
Nous étions rentrés en France pour mon accouchement. Jona est arrivé, il est en pleine forme. Nous avons donc repris la route à 5, cette fois, depuis fin Janvier, direction la
Grèce!
Voici les liens vers nos pages si vous souhaitez nous suivre:
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Nous remercions chaleureusement la famille Agotrip d'avoir partagé leur mode de vie avec nous!
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